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Twitter dévore les billets ? Et alors ?

Posted in ! - Boulchit, ∞ - Toudoto, □ - Lotek, Ш - Sochol by [ Enikao ] on 14 avril 2009

Il m’avait semblé que les blogueurs, du moins une bonne partie des blogueurs médias et technologie que je mentionne souvent, écrivaient moins ces derniers temps. Jean Véronis semble le confirmer et propose une explication : les foutus gazouillis de Twitter auraient phagocyté le temps de rédaction de billets et même (dit-il) de commentaires.

Twitter a-t-il donc écorné, essoufflé la blogosphère en lui rognant une partie du temps que l’on passait à bloguer ? Est-ce que Twitter c’est tromper ? Et finalement, est-ce bien grave ?

Faisons un parallèle avec les temps anciens. Fut un temps, seules les lettres permettaient la communication à longue distance. Puis, avec le télégraphe et le télégramme, on a pris l’habitude de rédiger des formats courts pour remplacer les lettres les moins nécessaires. Le tout en prenant en compte deux contraintes importantes : le message était en quelque sorte semi-public puisqu’il fallait le confier aux bons soins des employés des services de poste (les lecteurs d’Arsène Lupin se rappelleront les textes codés ou les phrases à double sens que nos ancêtres utilisaient pour faire passer de discrets messages), et l’espace était restreint pour des raisons pas seulement budgétaires. La rapidité de diffusion primait sur la complétude de l’expression. Bien entendu, pour donner de vraies nouvelles, pour déclarer sa flamme, s’enquérir de la santé de tante Berthe, échanger sur ses dernières lectures où sur ces maudits impressionnistes, on écrivait de vraies lettres.

Avec les blogs, on a pris le temps de s’épancher ou de faire de courts billets d’humeur, de développer des théories ou de publier une simple image drôle, ou encore une liste de liens hebdomadaires (sur le [Blok Not], ce rôle est dévolu aux [Brik a Brak], un peu à l’abandon je l’avoue). Voilà qu’avec Twitter on se met à faire d’une pierre des ricochets, pour changer des deux coups. On peut à loisir et de manière publique : écrire une idée ou une réflexion (en 140 caractères, mais c’est faisable), envoyer une image, mentionner une citation, faire des liens, commenter, répondre, adresser un  message totalement personnel…

Le parallèle lettre / blog et télégramme / Twitter est assez troublant.

Or il y a un élément que l’on semble oublier : l’apprentissage et le changement des usages. Oui, ces fichus usages qui évoluent sans que l’on s’en rende compte, naturellement, un peu en douce. Certains blogueurs / twitters ont changé leur façon de faire. Nous (je me compte dedans) avons peut-être appris à faire court dans la quantité de texte. A faire vivant. A être dans l’immédiateté, l’instant, ou du moins le temps court. Car sur twitter, on ne répond pas à un gazouilli au-delà de quelques heures, sinon tout est stratifié et donne l’impression de débouler en plein milieu du dîner chez quelqu’un pour dire : au fait, ce que tu as dit ce matin, et bien je suis d’accord !

Si au lieu de considérer que la brièveté était une catastrophe on trouvait qu’elle avait des vertus ? Si apprendre à être concis, simple, direct, sans fioritures c’était une qualité, une vertu ? Soyons honnêtes, une bonne partie de ce billet peut être résumée en quelques mots, il y a beaucoup de forme, de détails et de nuances qui, s’ils sont agréables à lire, n’apportent peut-être pas grand chose à l’idée que je défend en elle-même.

J’ai remarqué, dans ma pratique personnelle, que finalement 140 caractères pouvaient suffire à exprimer l’essentiel de certaines remarques, de certaines interrogations, de certaines exclamations, et que Twitter (que je conçois comme faisant partie de mon expression en ligne comme ce blog, et qui donc a sa place dans la rubrique Chortspitch à droite quand les flux RSS de Twitter ne font pas des leurs) peut suffire. Aussi, si je peux faire l’économie d’un billet qui demander davantage d’efforts pour un contenu qui ne sera pas nécessairement plus pertinent, je le fais.

Et encore, 140 caractères c’est la règle, mais mon rapport ayatollesque, comme diraient d’aucuns, à Twitter me prive encore de quelques précieux caractères. Ainsi,  j’indique mes sources quand il y en a, en indiquant via, plutôt que RT pour retweet que je trouve laid (et hop, un caractère perdu !) ou en mentionnant l’auteur quand il est lui-même sur Twitter. c’est une manière de l’avertir tout en le citant comme source pour ceux qui seraient tentés de le suivre par la suite.

J’indique également la catégorie dans laquelle se classerait le gazouillis en question, par un terme de mon cru entre crochets qui correspond aux mêmes catégories que ce blog (pour plus d’informations, déchiffrez le fond d’écran de ma page Twitter web) car la cohérence de l’une des plateformes d’expression par rapport à l’autre me tient à coeur. Je tiens à ces catégories car rien n’est plus énervant qu’un twitt de type « Trop fort ! » suivi d’un lien, voire un lien seul. Alors que donner à l’avance la couleur permet aux followers de se faire une (petite) idée et les incite à cliquer sur le lien ou à passer leur chemin. Je note que de célèbres blogueurs / twitteurs s’y mettent eux aussi, à cette mode des crochets et des catégories, par exemple Fred Cavazza ici, , et . Si on ajoute un lien, même en URL raccourci, le texte se résume à une petite centaine de caractères.

Et bien c’est parfois amplement suffisant pour s’exclamer, s’étonner, moquer, pointer, remarquer. En tout cas c’est mon sentiment, et j’ai pris goût au format court en l’adaptant à ma manière.

Mais peut-être n’êtes-vous pas du même avis.

Ceux qui ne pourront effectuer cette migration de manière durable sont ceux qui ont besoin de traffic, soit parce qu’ils tirent des revenus de leur blog (billets sponsorisés, publicité) soit parce que leur expertise vendue ailleurs ne saurait se suffire d’un Twitter pour vitrine.

11 Réponses

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  1. […] Original post by [ Enikao ] […]

  2. Eric said, on 14 avril 2009 at 9:27

    Oui, j’en parlais récemment (http://crisedanslesmedias.hautetfort.com/archive/2009/03/14/la-conversation-migre-vers-twitter.html)

    Et l' »inconvénient » de twitter c’est qu’on linke moins les blogs! Pour les accros de technorati et autre classement wikio, ça fait un manque.

    Enfin, concernant twitter, c’est bien joli (j’adore, chiffres à l’appui: 648,665,3860!) mais passé un certain nombre de followers, on ne peut plus tout lire. Mais je suis peut-être trop de monde…

  3. Flav said, on 15 avril 2009 at 8:33

    Pas de doute, Twitter a entrainé de nouveaux usages et une nouvelle manière de concevoir l’information… Enfin pour les early adopters, en l’occurrence les blogueurs. Je ne conçois toutefois pas Twitter comme une réelle alternative aux blogs. Son aspect chronophage va certes freiner les ardeurs de certains actifs sur le blogosphère…Mais de là à s’y substituer, il y a un pas. Il a toujours fallu faire des choix et arbitrer entre de nombreux billets sur son blog… Twitter permet d’avoir une approche plus exhaustive (ou en donne l’impression), le côté rapide et immédiat aidant. Mais pour les analyses plus profondes (comme tu le précises), pour prolonger les débats ou encore pour rassembler sa communauté, le blog reste la norme. Twitter a ajouté à l’éparpillement, dans un domaine où le manque de temps est le principal ennemi… Il y aura donc peut-être du tri, mais j’espère voir rester des blogs de qualité, et pas seulement les adsense ready ouverts pour générer des revenus … Bref, je vois les deux comme un complément idéal (un peu comme toi finalement, c’était bien la peine que j’argumente :-) )

    Autre point qui me parait important, la « jetabilité » de l’information sur Twitter, là où les blogs sont plus durables à mon goût…Mais çà je l’ai déjà abordé dans un billet ;-)

  4. [ Enikao ] said, on 15 avril 2009 at 8:46

    @Eric Merci pour ce billet qui m’avait échappé (oui, je sais, ce n’est pas bien). N’étant pas particulièrement passionné par les classements, que je consulte par curiosité concernant ce blog, le fait de faire le yoyo n’est pas bien grave même si, comme le l’indique en conclusion, je me doute que ça pose des soucis à certains.

    C’est peut-être révélateur de quelque chose d’ailleurs : une blogosphère qui ne se juge et ne s’évalue qu’à l’intérieur d’un seul univers, les blogs eux-mêmes. L’influence dépasse de loin cette seule biosphère : il faudrait inclure Twitter, mais aussi pourquoi pas la présence dans les médias traditionnels (radio, TV, presse…). A ce jeu-là Wikio et Technorati ne peuvent suivre pour des raisons de budget de pige, mais c’est une idée à creuser…

  5. Eric said, on 15 avril 2009 at 9:59

    « C’est peut-être révélateur de quelque chose d’ailleurs : une blogosphère qui ne se juge et ne s’évalue qu’à l’intérieur d’un seul univers, les blogs eux-mêmes. L’influence dépasse de loin cette seule biosphère : il faudrait inclure Twitter, mais aussi pourquoi pas la présence dans les médias traditionnels (radio, TV, presse…).  »

    Oui, c’est exactement ça: la présence d’un blog s’évalue en dehors de l’univers des blogs.

  6. Nicolas Gosset said, on 15 avril 2009 at 11:46

    Article intéressant

    Si certains des blogueurs publient moins et tweettent plus c’est qu’une partie de leurs billets était du simple commentaire de liens « untel a dit que…, mais moi je pense que… ». Et Twitter est bien plus efficace pour cette pratique…

  7. [ Enikao ] said, on 15 avril 2009 at 11:58

    @Nicolas Gosset Alors autant s’économiser et faire au plus efficace ;-)

  8. […] BLOG Twitter dévore les billets ? Et alors ? à lire, c’est tout à fait vrai . Effectivement, faire un billet bien léché prend du temps. D’autres part il y a tant de chose à dire parfois que twitter permets de bener un peu les bonnes trouvailles […]

  9. […] n’a pas “dévoré mes billets”, puisque je n’ai jamais vraiment tenu de blog sur le long terme, mais m’a au contraire […]

  10. […] . [ Blok Not ] : Twitter dévore les billets ? Et alors ? Une bonne partie des blogueurs médias et technologie écrivent moins ces derniers temps. Jean Véronis estime que les foutus gazouillis de Twitter auraient phagocyté le temps de rédaction de billets et même des commentaires. Est-ce que Twitter c’est tromper ? Et finalement, est-ce bien grave ? […]

  11. […] – Twitter dévore les billets ? Et alors ? : pas de doute, Twitter prend de plus en plus de place. Au détriment des […]


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